Le repaire de glace – Chapitre #2
Chapitre 2 – Un bruit de verre
Installée dans un fauteuil qui grince légèrement à chacun de mes mouvements, je cherche une position confortable pour m’enfoncer dans le coussin moelleux, un livre à la main.
Il a fait un bruit de verre en elle, c’était vrai. Elle en a marre des ils qui ne tiennent pas debout tout seuls.
Je contiens un rire.
Je glisse l’emballage d’un sachet de thé entre les pages et pose le recueil sur le bord de la table. Le couverture est striée de bleu après que j’ai posé le livre sur une étagère nouvellement peinte. Mon regard se porte sur les propositions du tableau à idées.
Je sors de ma sacoche un grand cahier ligné. Je recopie les propositions en les classant par thème.
Léo, un torchon sur l’épaule, s’installe dans le fauteuil face au mien. Il croise les bras et me dévisage d’un air faussement sérieux.
– Alors ?
– Il y a un peu de tout. Au moins, beaucoup ont donné des idées.
– Mais ? demande-t-il en baissant les yeux sur mes mains qui s’entortillent.
– C’est un peu vague.
– C’est vrai que soirée à thème et ateliers sympas, c’est comme tu dis « un peu vague ». Tu as vu, il y en a un qui a dessiné des gâteaux et des dés. Il y a aussi karaoké et blind test. Ca peut-être super ! Tout le monde aime ce genre de soirées.
Je mordille mon crayon en relisant mes notes. Il s’approche du cahier et fronce les sourcils.
– Poésie Ce n’est pas sur le tableau.
Il fixe le livre à la couverture grise, aux tâches bleues, un instant. Je me tends légèrement.
– J’imaginais essayer quelques autres idées. Cela pourrait donner envie à d’autre visiteurs de découvrir le lieu, et à ceux qui le connaissent déjà de venir plus souvent.
Léo ne fait aucun commentaire à propos des évènements.
– Tu vas y arriver, m’encourage-t-il.
Je retourne la page et je parcours une nouvelle fois la liste. Après-midi jeux de société, ateliers avec un artiste, rencontre avec des écrivains. Je note quelques noms d’artistes du coin qui me viennent en tête et qui pourraient correspondre à l’ambiance du Repaire. Evidemment, on pourrait faire énormément de choses, mais il va falloir décider par où commencer.
Je me revois, à l’instant, me justifier maladroitement auprès de Léo. Ces derniers temps, il m’arrive régulièrement de me sentir dégringoler comme si je me cassais la figure à l’intérieur de moi.
Léo travaille depuis plusieurs années dans ce café, il connait les clients. Peut-être que mes idées ne correspondront pas aux attentes de leurs public même si cela elles me semblent, à moi, enthousiasmantes. Quoi qu’il en soit, je peux toujours, essayer.
– Les bonnes idées mettent parfois du temps à trouver leur place, dit Hélène en brandissant la cafetière. Je te sers ?
– Oui, merci. Tu penses que cela peut fonctionner ?
– Oui, je pense, il faut simplement prendre le temps.
– Je verrais bien ensuite en les rencontrant de quelle manière ils ont envie de passer leurs moments ici.
– Tout à fait.
Franck rejoint Hélène et lui tend aussi sa tasse. Elle le sert et fait signe à Léo de la rejoindre au comptoir.
– Le temps, grogne Franck à l’attention d’Hélène, comme si on l’avait.
Je me reconcentre. Je veux terminer une première proposition que je pourrais confier à Franck d’ici une heure. Il me faudrait décider de trois ou quatre ateliers avant la fin de l’année. Il reste aussi les décorations de Noël à accrocher, j’aimerais que les clients puissent les découvrir dès la semaine prochaine.
Je sors un agenda neuf de mon sac et répertorie par couleurs la nature des activités et je reporte pour le mois de décembre les idées qui me semblent réalisables rapidement et attractives à la fois. Léo a raison, on pourrait commencer par animer un karaoké. Nous avons tout le matériel sur place.
Mon téléphone vibre, je lâche mon agenda un peu lassée et fouille dans ma sacoche. Voyant qui m’appelle, je m’adoucis.
– Coucou Stella !
– Salut Livia, merci encore pour hier soir. On s’est vraiment bien amusés !
– Moi aussi, je te remercie, l’ambiance était très agréable. Je suis contente que le public vous ai écoutés avec autant d’attention. Vous avez su les capter. Vos chansons sont émouvantes et créent du lien entre les gens.
– Avec plaisir ! Je suis vraiment contente d’avoir pu jouer le tout premier concert de ton nouveau café. s’exclame-t-elle.
– Stella, cette-fois, ce n’est pas mon café, dis-je en cherchant comment régler le volume de mon téléphone pour que l’on n’entende pas Stella s’extasier jusqu’au comptoir à l’autre bout de la salle.
– Non, mais au moins, ici tu peux te consacrer uniquement à ce que tu aimes le plus ! Fini le service et l’inventaire des stocks, tu peux juste inviter plein de monde et profiter des activités.
– Oui, tu as raison, je trouve ça passionnant ! Mais c’est quand même un peu plus que ça, je lui rappelle en plaisantant.
– Tu sais, si ça peut t’aider, tu pourrais envisager de demander un peu de soutien de la part d’un serveur. Parfois, un petit coup de main fait toute la différence.
J’entrouvre la bouche, mais rien ne me vient. J’aligne machinalement mes stylos un à un sur la table basse.
– Livia ?
– Oui ?
Je contiens un gloussement, qu’elle partage à l’autre bout.
– Je voulais juste dire que tu peux t’appuyer sur les autres. Il a l’air attentionné et que je pense que tu peux lui faire confiance.
Une chasse d’eau se fait entendre sur ma droite, je me retourne et guette celui de mes collègues qui pourrait entendre notre conversation.
– Je vois très bien ce que tu veux dire et pour être honnête, j’y ai déjà pensé. C’est seulement que, tu sais, je ne pense pas qu’il est très pertinent d’envisager de me rapprocher de nouveau …
Le bruit d’un robinet qui coule puis du séchoir à mains me distraient.
– d’un collègue.
Je termine ma phrase d’une voix basse en regardant sortir Niels des sanitaires. Il me salue d’un air poli, rabaisse ses manches sur ses poignets, je crois y voir des cicatrices recouvrir ses deux avant-bras.
– Tu as dit quoi ? demande Stella.
– J’ai dit, avec un collègue, je répète en essayant de prendre un air naturel. Ca peut assez mal se terminer.
– Je comprends. En tout cas, tu avais l’air fatiguée Livia. Prends soin de toi et appelle-moi surtout, si tu te sens seule ou si tu veux te changer les idées d’accord ?
– C’est gentil, merci. Je t’assure que je vais bien.
Niels est de retour avec une pile de bocaux qu’il se met à aligner sur l’étagère du vaisselier à côté de moi. Je lance Stella sur un autre sujet.
– Au fait, c’était bien le musée des chats ?
Je crois voir une expression amusée s’afficher sur le visage de Niels.
– C’était génial ! S’écrie-t-elle, et j’éloigne le téléphone de mon oreille, me rendant compte qu’au volume minimum, on entend encore distinctement ce qu’elle dit.
Niels a entendu. Je porte ma main à ma bouche, comme si je m’en voulais d’avoir fait une erreur. Je me laisse imaginer à quel moment il a pu commencer à entendre la conversation.
– Tu sais, les chats ressentent les émotions des personnes qu’ils côtoient, m’explique Stella. Ils sont une vraie source de réconfort et on en propose même aux prisonniers ou aux résidents des établissements pour les personnes âgées.
– Ca devrait être normal, j’ajoute. Tout le monde devrait côtoyer d’autres êtres que les êtres humains. Ils ont beaucoup plus de sagesse que nous, ça nous permet au moins d’apprendre à se comprendre et puis à prendre soin.
– J’ai supplié Adam pour que l’on aille dans un refuge quand on aura terminé la tournée, s’emballe Stella. Je voudrais adopter des chatons pour Noël. Il a dit oui !
– Des chatons ? Je répète, amusée.
De loin, j’entends Adam prévenir Stella.
– J’ai pas dit oui pour une portée entière !
– Vous avez l’air d’être bien décidés, en tout cas.
– Tu pourrais accueillir des chats, au café, Livia ! Ca ferait venir les gens. Ils pourraient faire connaissance avec eux et les adopter si le coup de foudre se produit.
– Je ne suis pas sûre que Franck soit d’accord avec cette idée, lui dis-je, le sourire aux lèvres. Et de toute façon, je préfère les chiens.
J’avance discrètement dans la cuisine, je n’ose pas déranger.
L’odeur sucrée des gâteaux en train de cuire flotte dans l’air, cela en devient presque étouffant dans ce petit espace. Franck dépose des feuilles de salade sur des pains à hamburger. Une sonnerie retentit brièvement. Aussitôt, il cesse son geste, saisit une manique et va ouvrir le four. Il y regarde longuement, comme dans un microscope et referme la porte, abaisse délicatement la poignée. Il installe une balance sur une table derrière lui et verse une petite quantité de farine sur le tamis.
Niels penché sur un saladier, m’adresse un signe de tête en me voyant entrer. Il saupoudre des petits grains foncés avec trois doigts tenus bien en hauteur, au dessus du bol, comme s’il jouait à viser.
– Tu es sûr de ce que tu fais ? demande Franck, jetant un coup d’œil sévère de côté, une ride entre les sourcils.
Niels mélange les ingrédients dans la pâte avec enthousiasme en effectuant des gestes amples avec sa cuillère.
– Je crois que ça peut ajouter un truc.
Franck s’approche et regarde par dessus l’épaule de Niels.
– C’est de la cardamome, observe-t-il.
Il prend une petite cuillerée de pâte et la goûte, plissant légèrement les yeux.
Franck penche la tête, comme s’il pesait le pour et le contre. Il repose la cuillère dans le bol et après un instant, croise les bras sur sa poitrine.
– Pas mal… Mais si tu rates la cuisson, c’est toi qui te fais engueuler par la clientèle.
Niels le fixe, un sourire en coin apparaissant sur son visage.
– J’aime vivre dangereusement, répond-il, malicieux.
Franck le regarde, un sourire infime balaye son visage. La sonnerie du four retentit de nouveau, il enfile à nouveau sa manique, exécute les mêmes gestes, automate, puis revient à son plan de travail.
– Si ça rate, c’est sur toi, prévient Franck, mais il y a une lueur d’amusement dans ses yeux.
Niels verse la pâte dans des moules à madeleines.
– J’assume, répond-il, l’air plus sûr de lui.
– T’es un casse-cou, toi.
Je m’avance un peu plus et ose enfin les interrompre.
– Franck ?
– Livia ? s’amuse-t-il.
J’agite mon travail sous ses yeux.
– Ce sont mes propositions d’animations, pour le mois de décembre.
– Super, mets ça sur le comptoir, je regarderai ça avant de partir.
– Je vais pouvoir décorer maintenant, lui dis-je en retenant ma joie.
– Pas trop tôt, provoque-t-il. J’ai sorti la caisse de décos, elle est dans le bureau. Tu verras, c’est marqué dessus.
– D’accord.
Je quitte la cuisine et traverse le café d’un pas hâtif.
J’attrape la caisse à l’inscription Noël. A son poids, je m’impatiente de découvrir à quoi ressemblent toutes les décorations. Je tiens la porte ouverte avec le pied et me fraye un chemin en titubant.
– Attends, Livia, j’arrive, m’interpelle Léo lorsqu’il me voit passer.
Il est en train de ranger des briques de jus de fruit.
Je hisse la caisse sur une table excentrée et tente de regarder Léo en m’écartant du halo du soleil qui se couche. Puis je retire le couvercle et saisit le premier objet qui se présente.
– Attends-moi, répète Léo.
J’attends, guirlande en main. Je scrute le café, tout est bien ordonné. Il ne reste que deux femmes assises à l’endroit où j’avais travaillé un peu plus tôt.
Léo me rejoint et commence à sortir du carton les guirlandes d’un côté, les boules de l’autre.
– Je te donne un coup de main.
Il sort de la caisse une quinzaine de tout petits sapins et termine par une pile de chaussettes de Noël.
Je contemple piteusement l’armée de sapins minuscules.
– Qu’est-ce qu’il y a ? me demande-t-il. Ca ne te plaît pas ?
Je ne commente pas mais accentue la moue sur mon visage.
– Ceux-là ne perdent pas leurs épines, et si j’en place sur chaque table, tous les clients peuvent facilement en observer un, depuis leur place, argumente Léo.
– Effectivement … dis-je en gardant l’air sceptique. Et comment est-ce que l’on accroche des boules sur des sapins aussi petits ?
– Eh bien …
Il réfléchit.
Une boule roule se met à rouler sur la table et tombe sur le sol dans un bruit de verre brisé, suivie de près par deux ou trois autres boules.
Gênée, je bredouille en tentant l’humour.
– Manifestement, on ne va pas les accrocher …
– Mince, dit Léo en se précipitant, mains en coupe, alors qu’il n’y a déjà plus rien à rattrapper.
– Ce sont les boules que Franck a achetées pour cette année, n’est-ce pas ?
Léo fronce le nez, ce qui lui donne un petit air de caneton, je ne peux m’empêcher de m’amuser en caricaturant sa mimique.
– Je vais chercher une pelle, dis-je.
– Tu sais où c’est ?
– Non, je lui crie alors je que suis déjà partie dans une direction.
– Côté comptoir, dans le placard à gauche de la machine à café.
– Merci, dis-je en chantonnant.
Je change de direction, attrape la pelle et la balayette et retourne m’agenouiller à côté de Léo, toujours au sol devant les débris. Il tente de récupérer la pelle de mes mains, mais je la maintiens.
– Arrête ! Qu’est-ce que tu fais ?
– Je vais m’en occuper, dit-il.
Il essaie à nouveau de me subtiliser la pelle.
Comme je ne cède pas, il agrippe ma main et j’éclate de rire.
– Va plutôt commencer à installer les mini-sapins, je lui dis. Je te rejoins.
Il soupire et se lève en époussetant son pantalon.
– Ok pour cette fois, plaisante-t-il, mais je n’ai pas dit mon dernier mot.
Je récolte les morceaux de verre brisé et me dirige vers la poubelle mais j’interromps mon geste au moment de jeter. Les multiples morceaux de verre pailletés scintillent sous les spots de lumière. J’ai envie de les garder. Je dépose les morceaux précautionneusement dans une petite boite en plastique et je ferme le couvercle.
Léo me rejoint, sans doute a-t-il terminé sa mission.
– Qu’est-ce que tu fais ? me demande-t-il.
Il s’approche et voit les morceaux dans la boîte.
– Qu’est ce que tu vas faire avec ça ?
– Je ne sais pas encore. Mais ils sont jolis.
– En tout cas ne les laisse pas ici. Si Franck les voit …
– De toute façon, je lui fais remarquer, il va bien s’apercevoir qu’il manque quelque chose. Il ne reste plus que deux boules de Noël.
– Il n’en avait acheté que six. Ce n’est pas ça qui aurait changé la donne. Il en aurait fallu plusieurs dizaines pour que vaille le coup !
Il s’interrompt, dans ses pensées et je vois ses yeux pétiller.
– Tu sais quoi ? Peut-être qu’on pourrait en faire avec les clients. Un atelier Boules de Noël !
– Oui. C’est toujours sympa.
Je souris à Léo. L’idée est assez classique, mais je ne veux pas le vexer. Son enthousiasme me gagne, je me dis que si ça lui plaît, ça plairait peut-être aussi à certains clients.
– Cependant, j’ajoute, il va falloir quand même trouver qu’en faire de toutes ces boules de Noël.
– Les gens vont les garder, pardi !
– Je ne sais pas. Ce serait bien si l’on pouvait leur proposer d’en faire autre chose, ou de laisser leur création ici pour personnaliser le café, dis-je tout en réfléchissant. Ils pourraient décorer leur boule de Noël en représentant leur souhait le plus cher. On les suspendrait toutes sur le mur en bois là bas avec des jolies punaises …
Je prends un voix plus douce et je mets le ton pour raconter la suite.
– Et on leur racontera que le renne magique du Père-Noël, un renne blanc qui ne peut pas vivre à la lumière du jour et dont presque personne n’a entendu parler, viendra souffler sur leurs vœux pour qu’ils se réalisent.
Niels surgit derrière le comptoir, une tasse à la main.
– Nous leur raconteront qu’un soir d’hiver, il faisait tellement froid que la glace a gelé le sol tout entier et a commencé a s’attacher aux pattes du pauvre petit renne blanc. Epuisé et affamé, il s’était écroulé à l’arrière du café. L’équipe du Repaire a recueilli ce petit renne en détresse, l’a nourri et l’a soigné afin qu’il puisse retrouver le Père-Noël juste à temps pour le soir le plus important de l’année. Depuis, pour nous remercier, chaque année à cette date, il revient pour exhausser l’un de nos vœux le plus cher.
J’avale ma salive, captivée par la voix feutrée qui déroule la suite de l’histoire. Quand il se tait, un frisson me parcourt. Niels sort du personnage de conteur et laisse échapper un rire rauque qui résonne dans l’air.
– C’est audacieux, Livia, mais ça pourrait marcher, dit-il posément, sans même me regarder.
Je lève les yeux vers lui, étonnée.
Niels hausse les épaules et lance, presque pour lui-même.
– Les gens aiment sentir qu’ils font partie de quelque chose. Vous pourriez même en faire une tradition annuelle.
Son regard croise brièvement le mien avant qu’il ne retourne dans la cuisine.
– Si tu te poses la question, il est toujours aussi énigmatique, plaisante Léo.
Je secoue la tête et regarde un moment en direction de la cuisine. Je ne décèle aucun bruit.
– Depuis combien de temps est-ce qu’il travaille ici ?
– Quelques mois. La clientèle est croissante et Franck dit que c’est le moment clé, qu’il ne faut pas perdre le rythme. Mais il travaille énormément. Il cherchait un commis pour l’aider à préparer le déjeuner et les pâtisseries.
J’ai peur d’être indiscrète, mais j’ose tout de même demander.
– Pourquoi lui ? Il ne paraît pas particulièrement …
Je regrette d’avoir commencé ma phrase et cherche mes mots.
– Sociable ? rigole Léo. C’est pas son point fort. Mais il est brillant.
– Brillant ?
– Il a gagné un prix national des jeunes pâtissiers, ou un truc du genre, il y a deux ans. Franck adore repérer ce genre de « diamants bruts ».
Je reste un moment silencieuse, les mains toujours posés sur la boîte contenant les morceaux de verre. Je jette un nouveau coup d’œil vers la cuisine, toujours silencieuse. Un prix de jeunes pâtissiers. Il aurait environ vingt-cinq ans tout au plus, peut-être moins.
– Qu’est-ce qu’il fait ici, alors ?
– Bonne question. Peut-être que tu devrais la lui poser.
Les deux dernières clientes viennent régler leurs consommations auprès de Léo. Je m’assois au comptoir devant la feuille manuscrite du calendrier des évènements que j’ai laissée à l’attention de Franck.
– Et Livia, relance Léo, on le fait alors cet atelier Boules de Noël ?
– Oui, on pourrait commencer dès la semaine prochaine. C’est faisable en libre-service et je pourrais être là pour aider les clients, si certains en ont besoin. Il faudra juste que j’aille faire les courses mardi dans la matinée. Je pourrais aussi peindre un grand renne blanc et y écrire le concept de l’atelier. On l’afficherait sur le mur.
Léo s’accoude au comptoir, un sourire à la fois moqueur et sérieux sur les lèvres.
– Tu sais tout faire toi. On va finir par croire que t’as des super-pouvoirs pour sauver les morceaux cassés et les rennes perdus.
Il poursuit, amusé.
– Mais ne t’inquiète pas, si quelqu’un abuse de ta gentillesse, je serai là pour te rappeler que tu dois aussi penser à toi.